temps de lecture 4 mn
Mot choisi par Alicia, en stage de 4ème à la MJC.
Atelier d’écriture du 24 mars 2025
« CONNAISSANCE »
Alicia si petite nous a trouvé un mot si grand ! Il est si vaste ce mot « connaissance » que je suis resté longtemps sans avoir par quel bout le prendre.
Bizarrement, dans un coin de ma mémoire, je l’ai trouvé en couple avec un autre, inattendu : le mot « arbre ». Mon cerveau avait bien une case étiquetée « Arbre de connaissances » mais elle était vide. Impossible pour moi d’en donner une signification ni même de savoir à quelle occasion cet amalgame était entré dans ma vie.
J’ai pensé un instant que c’était une facétie cérébrale, eu égard à l’affection que je porte à chacun de ces deux mots séparément ; Wikipédia m’apprit que non.
Un arbre de connaissances est une représentation imagée et structurée de la somme des richesses que chaque membre apporte à une communauté : connaissances, compétences, opinions, évènement, projets, besoins etc. Ce fût un projet de recherche généreux visant à mieux comprendre les causes d’exclusion sociale liées au savoir et qui déboucha sur des outils concrets qui furent utilisés aussi bien par les services des Ressources Humaines des entreprises qu’à l’Éducation Nationale ou dans des structures d’aide à l’insertion sociale.
Je vous sais capables de lire cet article si vous en avez l’envie et l’intérêt aussi, je ne partagerai ici que quatre ou cinq points d’émerveillement que cette lecture a suscité en moi.
Le premier a été que ces travaux aient été placés sous l’égide de Michel Serres. Quelle audace et quel gage d’ouverture d’esprit que de recourir à ce niveau à un philosophe !
Ensuite, je ne résiste pas au plaisir de reporter ici les trois principes fondateurs qu’il fit siens pour orienter les réflexions du groupe de recherche.
- « chacun sait », du fait qu’il a vécu. Le savoir est une dimension de l’être, indissociable de l’expérience.
- « on ne sait jamais » reconnaît l’impossibilité définitive du savoir absolu et total
- « je ne sais pas mais l’autre sait », tout le savoir est dans l’humanité.
Quelles délices que d’entendre énoncer aussi simplement de si belles idées ! Voulez-vous une autre cuillerée de miel pour votre esprit ? La voilà :
- La représentation des connaissances n’est possible dans une communauté que s’il y a reconnaissance des savoirs de chacun par les autres membres du groupe.
Au fur et à mesure de ma lecture, d’autres mots amalgamés remontaient des profondeurs de ma mémoire : « valorisation des acquis de l’expérience » par exemple. Des mots bien policés qui avaient fleuri un temps sur les lèvres des politiciens, des mots qui furent un jour à la mode avant d’être oubliés.
En découvrant que ces travaux furent initiés en 1991 j’eus une sorte de vertige. Cette année là, mes enfants avaient à peu près l’âge de mes petits enfants d’aujourd’hui. Il a suffit d’une génération pour que se creuse tout un abîme dans nos valeurs.
Car aujourd’hui, que reste-t-il de tout cela ?
La reconnaissance ? Les humains se sont retirés des emplois au profit des fonctions, plus faciles à gérer. Du fond des campagnes jusqu’aux Ephad en passant par l’hôpital et encore bien d’autres détours, toutes les insatisfactions témoignent de son absence.
Les exclus du savoir ? Über et Amazon se les sont appropriés pour en faire des esclaves-livreurs.
Le savoir absolu ? Il n’a jamais été aussi présent qu’avec toutes ces « vérités alternatives » qui sont les nouveaux dogmes des réseaux sociaux.
L’ouverture d’esprit ? Un huis-clos d’entre soi, des discussions qui ne sont plus que des monologues où l’on se garde bien d’écouter l’autre de peur d’être contraint de se remettre en cause.
Même la recherche, elle qui savait si bien cultiver pour les hommes la richesse du mot « pourquoi », voilà qu’on se mêle de lui dire à quoi elle a le droit de s’intéresser.
Pour retourner à cet obscurantisme, une seule génération a suffi et ce fût la nôtre. Qu’avons nous fait, qu’avons nous laissé faire ?
Pauvre Alicia, aurait-elle imaginé être à l’origine d’autant d’amertume ? Elle n’y est pour rien, bien sûr, tout est affaire d’aiguillage.
J’aurais pu raconter tout l’espoir contenu dans le mot connaissance, tout le réconfort de penser qu’envers et contre tout il sera toujours possible de découvrir quelque chose ou quelqu’un que l’on ne connaît pas. Que la devise du mot « pourquoi » c’est : « No limit ».
Qu’il suffit par exemple de prendre un mot, au hasard. Au début il ressemble à un atome élémentaire, tellement petit, tellement insignifiant. Mais dès qu’on l’interroge et qu’on s’y intéresse, on découvre qu’il y a dedans tout un univers d’idées à suivre, pour s’en enrichir le temps d’un voyage.
Pour revenir à l’« arbre de connaissances », savez-vous quel est le politique qui lança ce projet de recherche ? C’était Édith Cresson.
Allons Mesdames, qu’attendez-vous pour prendre le pouvoir ? N’entendez-vous pas l’humanité qui vous appelle à son secours ?
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