temps de lecture 3 mn
Le billet du 26 mars 2017
L’heure d’été
Ce matin, elle est venue redonner de la voix, la ritournelle : c’est l’heure d’été, c’est l’heure d’été !
Les journalistes en ont fait des gorges chaudes, à mélanger les heures de plus aux heures en moins. Ils ont joué à faire semblant de nous faire croire que tout ça est compliqué. Depuis quarante ans qu’on le fait, on a quand même fini par comprendre, que pour saluer les beaux jours on dort une heure de moins.
Les grands penseurs de l’époque nous avaient revendu cette vieille idée d’avant-guerre comme s’il s’agissait d’une innovation. Les économies allaient pleuvoir, avec toutes ces lumières qu’on aurait plus besoin d’allumer. J’entends encore le slogan d’alors « En France, on n’a pas de pétrole mais on a des idées ».
Depuis, le changement a mené son chemin, les ampoules à LED font la nique aux kilowatts et les data centers boulimiques prolifèrent à tout va pour conserver jours et nuits, nos milliards de petits chats photogéniques….
Il n’empêche, l’heure d’été est restée et moi, j’aime l’heure d’été.
D’accord, le passage commence plutôt mal : une heure de sommeil volée, c’est désagréable. Mais bon, c’est un dimanche qui en pâtit et on sait bien que le dimanche, déjà d’ordinaire, le temps est élastique. Alors, pendant celui du passage à l’heure d’été, les horaires vont encore un peu plus en pente douce, ils hésitent entre les deux saisons, à l’image des pendules de la maison.
L’heure d’été a mis le pied dans la porte, ça y est, maintenant les beaux jours vont pouvoir rentrer. C’est une sorte d’officialisation que les choses vont aller mieux, un laisser-passer pour l’optimisme.
Évidemment, demain matin il faudra à nouveau se lever dans la nuit, petit-déjeuner sous l’aplomb de la lampe et buter du regard sur l’ombre de son abat-jour qui barre le mur de la cuisine. A nouveau on écarquillera les yeux au travers de la vitre pour percer les mystères du jardin blême, noyé dans des couleurs incertaines.
Mais maintenant, on sait que ça ne durera pas. Pour la deuxième fois consécutive, on va vivre ce plaisir de voir l’aube vaillante nous devancer un peu plus chaque jour. Jusqu’à faire pâlir de honte l’ampoule électrique et jusqu’à ces matins bénis où les raies de soleil, filtrant des persiennes encore closes, guideront nos pas hésitants dans la maison endormie.
J’aime ces journées où l’on entre de plain-pied dans la lumière, mais le cadeau de l’heure d’été que je préfère encore plus, ce sont les longues soirées estivales.
Je vous l’accorde, au 26 mars, elles sont encore loin. Mais justement, c’est une promesse sucrée que nous chante à l’oreille la ritournelle du changement d’heure.
Tu vas les revoir, tes crépuscules interminables qui t’accompagneront jusqu’au chemin du sommeil.
Tu vas y goûter encore, à tes douceurs orangées aux senteurs de tilleuls, si apaisantes sur les brûlures de Juin.
Ne vous y trompez pas, ce billet n’est pas une apologie de l’été permanent. J’ai eu l’occasion, quand j’étais jeune, de vivre seize mois d’affilés sous les tropiques. A la fin, rien ne me manquait plus que les feuilles qui tombent sous la pluie glacée et le givre qui frissonne sous un soleil pâle.
Au fond, ce qui me plaît dans la « ritournelle », c’est qu’on peut croire qu’elle rime avec « éternelle ».
⭐ Laissez votre avis sur cet article !
Si vous souhaitez voir d’autres publications sur le même sujet, cliquez sur l’étiquette ci-dessous


Laisser un commentaire
Vous devez vous connecter pour publier un commentaire.